Poème Haïku, Brin de pailledans les cheveux
Qu’en est-il du recueil de haïkus un Brin de paille dans les cheveux ? Le souvenir d’un petit rien, l’esquisse d’un sourire, un instant de complicité coquine enfoui dans la mémoire, un secret inavoué, une fantaisie amoureuse…
Attablons-nous sans pudibonderie au festin des sens auquel Diane Descôteaux nous convie et laissons-nous submerger par les évocations.
En tête-à-tête ou tête-bêche, un Brin de paille dans les cheveux réveillera-t-il les braises de la jeunesse ? Non ! Il suscitera les tendres réminiscences de l’âme, il animera les coquineries par le regard, il rappellera les doux frissons du corps sans les frontières de l’âge, car la blanche lune et l’ardent soleil ne coordonnent plus les sens.
Tout flotte autour de soi. Le cœur battant la chamade, le désir ne s’accroche plus à un vague souvenir… Les sens s’émoustillent… L’odeur fruitée des suçons d’amour grise les fibres du corps… La langue, spéléologue du corps, susurre de tendres caresses…
Toute l’attention se conjugue vers l’autre. Les résistances s’évanouissent. Il ne reste, pour seul vêtement, que les fantasmes des chairs étendues sur la couette des effluves ou sur la plage des désirs des amants dont les corps s’imbriquent dans la quête des spasmes d’une « petite mort » éternelle.
Claude RODRIGUE
Nous étions habitués à lire des recueils de poésie qui avaient une dimension érotique chez Diane Descôteaux. À travers tous ses voyages, la poétesse nous ouvrait largement des lignes, des pages sensuelles de ses cahiers intimes. Avec son habileté à broder des images chaudes et colorées, elle écrit des saisons où même la glace brûle.
nus sur du coton
à six cent vingt fils au pouce
nos corps à tâtons
Ce dix-huitième ouvrage semble le plus maîtrisé. Il y a dans les tercets de Descôteaux une triple contrainte de langage. Elle écrit avec la brièveté d’une poésie japonaise codée, elle retient également les rimes et le rythme du sonnet qu’elle a pratiqué durant plusieurs années et, enfin, elle impose un thème, l’érotisme, où elle est en quête des mots du désir. Son style devient ainsi unique. La tournure a une légèreté, une fantaisie qui laisse filtrer à la fois, sa grande érudition, sa connaissance de la versification et son réalisme brut.
qui me sauvera
de tout, surtout de moi-même
quand vous êtes là ?
Le sonnet utilise des figures de style qui donnent aux tercets un relent de classicisme. Elle passe du vous au il, du je au tu et au nous en introduisant des dialogues qui jouent avec la distance et l’intimité. Elle introduit ainsi la narration qui nous fait lire le recueil comme un roman. Qu’arrive-t-il à l’amant dans la page suivante ? Que pense l’amante en ce soir sans clair de lune ? Cela fait tourner la page.
Ses haïkus ne sont pas libres. Elle y tient un compte rigoureux des syllabes : 5-7-5. Alors que le haïku moderne se libère de cette règle. Elle peut donc utiliser les exclamations : oh ! ah ! hi hi ! ô, oups, onomatopées très japonaises. On entre ainsi dans le concept de mono no aware. La beauté et la tristesse de la nature, des saisons et des fleurs, de l’amour évanescent : « les hommes qui passent maman. »
plus de trente et une
trop interminables nuits
sans vous et sans lune
Le poème devient vivant, domestique, romancé. Est-ce sagesse, est-ce le destin humain aussi fatal que dans la mythologie ?
moi, l’idéaliste
je sais bien trop qu’entre nous
rien n’est réaliste
Une lecture nous attend où nous serons partagés entre le plaisir de la poésie et l’urgence de vivre. Au centre de ces contraintes rythmiques, nous avons rendez-vous avec la plus libre des poétesses.
Micheline BEAUDRY
Haïku - Brin de paille dans les cheveux
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Catherine Belkhodja – 24 juillet 2021
Une petite merveille dans ma boîte aux lettres ce matin : des haikus chauds, chauds, chauds de notre grande amoureuse Diane Descôteaux, magnifiquement illustrés par les linogravures d’Hélène Phung et présentés par notre ami Claude Rodrigue.
L’ouvrage est paru en 2019 chez L’Harmattan, mais nous vient du Québec.
Chaque page est un hymne à l’amant, à l’amour, au-delà des frontières, des couleurs, des peaux, de l’âge et des distances. C’est une ode à l’amour, à l’ivresse des corps et des âmes avec la petite note particulière de Diane, réputée aussi bien comme poétesse que comme haidjin. Entre poésie et haiku, elle fait rimer la ligne 1 avec la ligne 3, et ce, pour notre plus grand bonheur…
Je vous invite à partager ses transports …jusqu’au septième ciel !
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Véronique MOREL – 5 mai 2021
Je profite de ce mot pour vous révéler mes coups de cœur à la lecture de vos haïkus dans « Brin de paille dans les cheveux »:
(p.23 bas)
du bout de l’index
suivre une veine saillante
malgré le latexSensualité redoutable! J’adore!
(p.24)
jalouse du vent
qui, dans ses longs cheveux noirs
joue impunémentHummm! Vilain défaut!
(p.43 bas)
vent, neige et tourmente –
est-ce qu’il s’ennuie ou pas
quand je suis absente?Question troublante, s’il en est!
(p.52 bas)
sur sa fesse nue
ronde et d’un blanc saisissant
la lune poilueJ’adore la force de cette image, coquine, sensuelle!
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